L'APRES MIDI D'UN CAPITAINE
L
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e capitaine George Van Orden semblait avoir toujours été
l'officier de prédilection de l'amiral William Banks Caperton. Une
fois, comme les hostilités se poursuivaient dans le Nord, dans les premiers
mois de l'année 1915, et que l'amiral accouru en toute hâte de Vera
Cruz, Mexique, avait mis le cap sur Haïti, Van Orden ne savait pas que son nom
allait être associé au destin de cette république combien turbulente aux dires
des hommes d'affaires américains.
Il était environ 5H. P.M. quand le capitaine Van Orden
fit descendre ses hommes a Bizoton, cette banlieue de Pt-au-Prince, la où
114 ans plus tôt le général Brunet jeta l'ancre à la tète d'une
frégate du corps expéditionnaire français, aux ordres de l'amiral Villaret de
Joyeuse. Le port de Bizoton était d'un excellent mouillage. Ce soir-là, les
fusillers marins et les Blue Jackets avancèrent, guidés par des éclaireurs haïtiens, divisés en deux colonnes le long de
ce qui est devenu la route de Carrefour. Quelques coups de feu partirent de
certaines persiennes, mais c'étaient des coups tirés pour l'honneur national,
dira-t-on plus tard peut être. " Not à big concern" nota plus tard le
capitaine qui désarmait les soldats et officiers haïtiens médusés par le
débarquement des blancs. Aux environs de 7 H. P. M., Van Ordon avait atteint la
place du Marché Vallieres où il fit bivouaquer ses hommes. Sacré capitaine!
A bord du vaisseau amiral, Washington,
Caperon n'avait fait qu'obéir aux ordres venus de la Navy. La région
caraïbe était déjà assez tourmentée. Le Mexique et son golfe où s'échelonnent
les iles de l'archipel n'étaient pas des plus tranquilles. L'Amérique et
sa Méditerranée se fronçaient les sourcils depuis que un des théoriciens de la
Navy considérait comme une sorte de Carthage ces poussières d'iles qui
s'agitaient aux portes de Rome, donc dans la méditerranée américaine,
selon l'expression si imagée du capitaine Mahan. Haïti en particulier était une
véritable épine dans le talon yankee. Donc, le soir où le pauvre Van Orden
debarqua ses troupes, Caperon qui l’avait instruit d'une telle mission écrira
dans son journal intime: I feel sorry for the Haitian people, faisant ainsi
echo au président Woodrow Wilson lui même. " Les banquiers me
harcellent tellement" confiera-t-il a sa fiancée. Le president Wilson
était veuf depuis des années.
Van Orden, lui-même, va se faire un nom dans les
affaires haïtiennes. On le verra posant au Cap Haïtien en compagnie de
l'amiral Caperton, vieilli avant l'âge comme ces loups de mer qui
peuplent les romans de Jack London. La photo montre aussi le capois
Surin Villard, et d'autres officiers, apparemment en tenue de gala. A
l'arrière plan, Van Orden et des membres du personnel indigène. Il n’y a
pas cet air de conquérant qui frappe d'ordinaire chez
l'occupant. Toutefois, un air d'incertitude flotte même chez le
vainqueur. L'amiral Caperton et ses hommes dégagent une atmosphère de banalité incompatible hélas
avec l'esprit de la "Pax America" qu'ils ont imposé à un prix
jusqu’ici non défini au pays de la magie vodou.
Van Orden, le capitiane d'un après midi de 1915, fera
carriere. Il a déjà fait le Nicaragua, a reçu des décorations. Mais, c'est un
officier discret qui fera egalement la 2 eme guerre mondiale, sans tambour ni
trompette. Aujourd'hui, on s'arrache sa tunique et ses épaulettes repérées par
un curieux de Facebook.
George Van Orden, le capitaine du corps
Des marines, qui débarqua ses troupes en
Juillet 1915, a Bizoton, banlieue de Pt au Prince,
dans l'après midi, sur les 5 h PM.
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