Je suis de cet avis.

La question de toujours « Quo
Vadis, ( ou vas-tu) Haïti », qu’une carte postale anonyme se posait une fois semble même n’être plus de mise. Pour le
meilleur et pour le pire, la modernité s’installe chez nous. L’internet et le
culte du téléphone cellulaire donne bien la mesure de cette rentrée d’Haïti dans les grands circuits
internationaux. En 1965, l’atterrissage d’un jet a l’aéroport de Mais Gâté n’avait
pas à ce point réveillé les consciences. Mais, dans la première décennie de l’an 2000, cette Haïti encore en grande partie
rurale se meurt à petit feu. Aucune différence
entre les gamins de Lisbonne ou de Rio et ceux de Pt Salut, en matière de communication. Même si
le PNB continue encore à mesurer les niveaux de vie, dans le domaine de la
communication, l’accélération tend à l’uniformisation de notre planète. Bill Gates
notait dans une communication à Harvard que cette planète se rétrécissait et
devenait même trop étroite.

Adieu foulards, adieu madras, est-on
alors tenté de répéter comme au temps des derniers tangos de Paris. Qu’après tant de
souffrances Haïti puisse renaitre la modernité, quoi de plus enviable !
Cependant, le printemps n’est pas si rose qu’on le croit. Sans prétendre jouer
les Cassandre, il y a derrière la magie de notre époque des zones d’ombre qui
pourraient bien annoncer la fatalité si redoutée mais hélas toujours possible.
La portoricanisation reste toujours une échéance probable, laquelle ne
ferait que signer l’échec des élites. La privatisation qui parait inévitable ne
ferait l’affaire que d’une certaine mafia, trop heureuse de chanter cette ère
de libertés qui au fond menacent la liberté.
A quoi sert en fin de compte l’état quand les marchands se mêlent de faire une
histoire qu’ils ignorent ? Non pas
que la libre entreprise ne soit dans une certaine mesure ce panacée qui libère
le génie. Cependant, de quoi demain sera-t-il fait quand, la production réduite
à néant, on est sur le point de ne tenir
que grâce aux miettes de ce festin de sourds, indifférents à toute haitianité ?

Pourtant, pour ceux qui
connaissent bien cette Haïti qui n’a tenu que par le pouvoir de l’illusion, la déroute
est loin d’être le dernier rendez vous d’un peuple qui sut confondre et dérouter
l’adversaire. Que ce soit en religion ou en politique, Haïti est capable encore de sursauts les uns
aussi inattendus que les autres. Ce n’est
pas la première fois qu’on invente un destin pour Haïti, mais ce n’est pas non
plus la première fois qu’Haïti réinvente
son propre destin.
C’est sans doute là que se prépare
la bataille d’Haïti.
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