L
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orsque
j’étais enfant, malgré un environnement des plus heureux, il m’arrivait souvent de me demander pourquoi les haïtiens, mes
compatriotes n’étaient pas touches eux aussi par le progrès. Pourquoi, passé le chant et la danse lies a
des rites de passage, il y avait comme un sentiment généralise d’impuissance et
de
LEDA, LA FECONDATION |
fatalité. On me
dira plus tard que l’esclavage et l’histoire, telle qu’elle s’est déroulée interdisaient l’accès au bonheur. A l’époque, être
heureux se confondait et se confond encore avec la richesse matérielle, comme
le montraient les images d’évasion qui abondaient dans les magazines des années
60. Devenu adulte, je me laissais dire que cette malédiction de l’histoire haïtienne
nous rendait imperméable a ce qu’on appelle le confort et tout ce qui en découlait ;
famille stable, facilites économiques et mondanités. Comme j’avais été des mon
jeune âge séduit par le mode de vie en
cours sur nos terres profondes, je
notais sur ces terres la toute la détresse qui se rattachait au passe, a l’histoire.
Il est difficile de gouter aux fêtes de
la vie, concluais-je, quand tant de sang avait coule et tant de vies fauchées.
Les dieux pour lesquels nous dansions et
chantions et tuions même n’étaient
pas ceux la qui créaient le bonheur.
Autrement dit, il existait bel et bien une malédiction haïtienne qui fermait ce
peuple à l’ avenir.
Il y avait donc quelque part un déficit
d’humanité, on dira plus tard de savoir et de savoir technique, et l’on comprend
bien pourquoi à force de piétiner, l’histoire tuait le futur en se répétant.
Longtemps âpres, notamment dans la seconde moitie du 20 eme siècle, l’expansion
des sectes évangéliques soudées pour la plupart aux missions chrétiennes des églises
reformées basées aux USA justifiait a contrario l’infertilité des religions
animistes fondamentalement attachées à notre histoire. Rien ne pouvait sortir
de ce dynamisme stérile du panthéon vaudou. Nos dieux ne semblaient point être
ceux du bonheur, parce qu’ils n’étaient pas ceux qui pouvaient féconder le
futur comme l’œuf de Léda.
Alors, pour un tel
monde qui n’avait aucun lendemain, je tirais comme bien d’autres avant moi la
douloureuse conclusion que nos terres profondes et secrètes évoluaient sous le
signe d’une inavouable fatalité. Quel visage donner désormais à l’histoire et
au temps des hommes ? Les hommes meurent, et ils ne sont pas heureux, s’écriait
une fois Albert Camus. Si l’on voulait changer le cours des choses, il fallait
choisir dans le panthéon de Michel Ange
ou de la Reforme, des dieux plus cléments, plus soucieux de la condition
humaine, animes d’un dynamisme qui répondit une fois a l’attente des conquérants
sillonnant les mers phosphorescentes de JM de Heredia. Ces dieux vinrent, mais
ce qu’ils apportaient n’allaient que répondre à l’appétit des aventuriers
impatients de trouver une excuse à la barbarie et a leur soif de sang. Il éteint loin d’être les dieux que nous
attendions.
Mais, on continue encore à dire qu’Haïti
devait ce qu’elle était à l’esclavage et aux atavismes.
Vers quoi donc se tourner aujourd'hui que les vieilles generations evacuent la scene combien turbulente de l'histoire, ou donc porter le regard d'entre ces quatres vagues qui surent former la matrice de la nation? Il y a eu entre autres la vague blanche, puis la vague mulatre, ensuite la vague noire et enfin la vague humaine. Qui dira un jour d'entre ces quatres laquelle sut vraiment repondre aux pulsions profondes de la terre et des hommes?
Telle est peut etre la question.
Queens, NY
28 juin 2014
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