Livres et Société
NDRL.
Selon, l'auteur des jacobins Noirs, la question de couleur est la malediction haitienne
Le diplomate Pierre Chavenet m’a dit un jour qu’il faudrait lire AMOUR, COLERE, FOLIE de Marie Vieux Chauvet, si l’on voulait saisir l’intensité des luttes de couleur en Haïti. Je pense avoir lu un peu trop vite ce roman venu après ce que l’on appelé les Vêpres Jeremiennes, épisode postérieur au débarquement des treize de Jeune Haïti et également postérieur au choc des castristes avec la Brigade 2056, achevé piteusement a la Baie des Cochons en 1961. La question de couleur hante comme un spectre ce roman qui donne la parole aux victimes, en diabolisant les bourreaux dans la plus pure tradition de l’opposition haïtienne née dans les alcôves et les boudoirs, en attendant de parler le langage des armes. Quelques années auparavant, Marie Chauvet avait enrichi la littérature haïtienne d’un roman historique : LA DANSE SUR LE VOLCAN. Roman un peu ambigu et très réaliste cependant qui raconte l’histoire de deux jeunes mulâtresses qui découvrent non sans rage les cicatrices laissées par le fouet du commandeur sur l’épaule de leur mère. Ce fut cette cicatrice qui scella pour le meilleur et le pire leur destin à St Domingue.
Ce qu’il
convient de retenir toutefois, ce sont les affrontements que inspireront deux
visions différentes d’un monde coince sur ses terres mais nostalgique des
lointains horizons d’une Afrique mythique et d’une Europe qui encore
aujourd’hui veut donner le ton. Des sables de l’Anse d’Hainaut aux mangliers du
Maribaroux, la bataille est moins dans les faits que dans les âmes. Personne ne
veut s’accepter et chacun s’invente un visage. Celui du maitre bien sûr, mais
celui d’un esclave qui veut jouer au maitre sans cesser d’être esclave. Le Professeur Leslie M. Manigat disait que
l’esclave domestique, proche du maitre, avait aussi ses esclaves dans les
champs. Il a oublié d’ajouter que la plus grande menace que l’on pût faire à un esclave mulâtre, c’était de le
menacer de le vendre à un affranchi noir. Le rêve de Sonthonax reste donc une grande
illusion. Chaque fois que l’on touche à la matrice de ce pays, on entend le
ricanement moqueur du commissaire français, comme si, à la manière de l’œuf de Léda,
tout était joué au départ.
Les colères de Mie Chauvet puisent leur légitimité
dans les excès d’un certain pouvoir
noir, si l’on veut appeler les choses par leur nom. On se souvient que dans les
années 63 et 64, les journaux disaient que l’on veut à présent créer une
nouvelle bourgeoisie à base de vols, de rapines et de crimes. Le problème n’en
garde pas moins sa complexité. Et l’on entendra pour longtemps encore le
ricanement de Sonthonax toutes les fois qu’on s’arrêtera à la couleur de la
peau qui est loin d’être un horizon indépassable, pour parodier
Jean Paul Sartre.
Bibliographie
Les Jacobins Noirs
Cyril Lionel Robert .James:
1938
La Danse sur le volcan
Paris : Plon, 1957
Marie Vieux Chauvet
Amour, colere et folie
1968, Gallimard
Bibliographie
Les Jacobins Noirs
Cyril Lionel Robert .James:
1938
La Danse sur le volcan
Paris : Plon, 1957
Marie Vieux Chauvet
Amour, colere et folie
1968, Gallimard
Septembre 2012
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