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Friday, September 14, 2012

LA QUESTION HAITIENNE - Du sable, de la danse et de l'histoire

Il y a peut etre trois regions dans le monde ou la politique n’est plus ce qu’elle etait. Ce sont la peninsule arabe, Haiti et bientot le Bresil
Avant d’etre cette mosaique d’etats lies par le fanatisme et l’or noir, la peninsula arabe est d’abord une sorte de monastere ou le calendrier n’a rien a voir avec notre gestion plutot laique du temps. Plus qu’une culture, le monde arabe se caracterise par une soumission a la volonte de ses dieux nes comme la plupart d’entre eux dans des regions ou l’irrationel et l’imaginaire tiennent une place a part. C’est dans le desert arabe caracterise par l’immensite des sables ou naissent et meurent les mirages que Mahomet a eu sa revelation, laquelle, du Yemen a la Peninsule Iberique, communique aussi bien le frisson de l’aventure que celui de la conquete. Cette conquete est donc inseparable de la volonte supreme d’Allah qui l’a inspiree et l’inspire encore. Au moment ou le printemps arabe, selon la belle formule de Benoit Meshin,se reveille une fois de plus sur cette meme terre qui inspira a Lawrence les sept piliers de la sagesse, il est difficile de faire le depart entre les aspirations democratiques qui ont vu naitre et mourir une Jeanne d’Arc en Iran et les pulsions de l’integrisme arabe qui,dans cette peninsula, s’alimente a la source de la foi, celle –ci fut-elle meurtriere et destructrice comme on la connait en Amerique et dans le reste du monde occidental .
Ce printemps arabe est bien le printemps de la foi, signe vivant de cette crise de l’Islam sise a mi-chemin entre des aspirations nebuleuses au changement et sa vocation guerriere qui, tout au long de l’histoire, a donne a la chevauchee arabe les couleurs que l’on sait. Cette crise porte a la fois le sceau de la vie et celui de la mort, entremelant religion et politique dans ce curieux dosagedu fondamentalisme qui couta la vie a Sadate en 1981. Dans le monde arabe, la politique est bien voisine de la foi donc du fanatisme, meme a l’heure ou cette peninsule tente de sortir de son propre moyen age.
Mais, si bien loin, sur les bords de cette Mediterranee consideree comme une region d’epanouissement des civilisations Greco-romaines , l’on continue a se battre, a danser et a tuer au nom de Dieu, en Haiti c’est le contraire qui prevaut. La danse du nouveau president haitien, controverse mais repondant a cet elan vital qui rend si speciale la misere et la pauvrete haitienne, n’a rien a voir avec les guerres saintes de l’histoire d’Haiti, datant des annees anterieures a l’independence. Le fait que Haiti continue a chanter et a danser meme au plus sombre de l’histoire trahit une vitalite qui annonce le triomphe et les celebrations de la vie, pour parler comme Rene Dubos. La politique meme la plus cynique reste impuissante devant ces forces instinctives du jaillissment de la vie . Cette joie de vivre essentiellement apolitique a son poids dans les lendemains qui se preparent pour Haiti meme quand les pontes du Clerge Breton disaient le contraire,pres de 50 ans auparavant. En fait, contrairement aux recettes pour la croissance et les arguties tournant autour du PNB, la joie de vivre, en creant l’illusion du bien-etre, a montre qu’il y a une maniere d’etre heureux . A croire qu’il existe egalement les dieux de la danse et de la transe.
Alors, entre les pays du minaret ou, a la tombee du jour, on appelle a la priere, replique musulmane de l’Angelus de Millet, et ceux ou chaque crepuscule est une invitation aux fetes des sens et de la vie, il y a de la place pour un dieu qui n’est pas celui de la mort et du fanatisme. Parce qu’ils ont leurs moeurs adoucies par la magie de l’art, les peoples qui dansent dansent beaucoup plus au nom de ce qui nait qu'au nom de ce qui tue. L’espoir du peuple haitien reside donc dans son sens irremediable du rythme et son culte de la joie. Une ferveur paienne est-on tente de dire, mais Dieu se sent et ne s’impose pas. C’est ce qui fait de la culture negre non pas une culture superieure, mais simplement une culture differente, qui continue de faire encore la difference.
Quant au Bresil, un sous continent marque du sceau de la demesure, et en meme temps terre de la samba,il fait déjà partie de ces pays du BRIC, le prochain defi americain. Mais, parce sortis malgre eux et sans le savoir du schema froid des organisations internationales, les bresiliens preparent plus qu’une revolution raciale. En creant ce monstre de la diversite epidermique dans ce sous continent,, ou le rythme a sa grace et la beaute son rythme , une symbiose jusqu'ici inedite, e Portugal colonialiste a libere des forces inattendues qui colorent et orientent l’histoire. Nul doute que l’art et la vie prendront le dessus meme quand les inegalites banalisent la mort et le quotidien. Il y a trop d’effervescence vitale au Bresil pour que le fanatisme soit un corollaire de l’injustice. Le chant et la danse sont devenus avec le temps notre meileur bouclier dans un monde devenu incertain et imprevisible .
Signes que l’histoire peut encore s’ecrire differemment.

Frantz Bataille,
North Miami Beach,
Avril 2011

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