globeadventureshorizons


Tuesday, September 25, 2012

L‘HORIZON NE S'ARRETE PAS A LA COULEUR DE LA PEAU.


Livres et Société 



NDRL.

Selon, l'auteur des  jacobins Noirs, la question de couleur est la malediction haitienne


Le diplomate Pierre Chavenet m’a dit un jour qu’il faudrait lire AMOUR, COLERE,  FOLIE de Marie Vieux Chauvet, si l’on voulait  saisir l’intensité des luttes de couleur en Haïti. Je pense avoir lu un peu trop vite ce roman venu après ce que l’on appelé les Vêpres Jeremiennes, épisode postérieur au débarquement des treize de Jeune Haïti et également postérieur   au choc des castristes avec  la Brigade 2056, achevé piteusement a  la Baie des Cochons en 1961.  La question de couleur hante comme un spectre ce roman qui donne la parole aux victimes, en diabolisant les bourreaux dans la plus pure tradition de l’opposition haïtienne née dans les alcôves et les  boudoirs, en attendant de parler le langage  des armes. Quelques années auparavant, Marie Chauvet avait enrichi la littérature haïtienne d’un roman historique : LA DANSE SUR LE VOLCAN. Roman un peu ambigu et très réaliste cependant qui raconte l’histoire de deux jeunes mulâtresses qui découvrent non sans rage les cicatrices laissées par le fouet du commandeur sur l’épaule de leur mère. Ce fut cette cicatrice qui scella pour le meilleur et le pire leur destin à St Domingue.


La couleur de la peau: le drame haitien...

Entre ces deux romans, l’un inspire des luttes  de la période coloniale et l’autre de la vie contemporaine dans une Haïti indépendante depuis plus de 150 ans, on retrouve comme une malédiction la question de couleur qui n’a pas été exorcisée malgré toutes les messes de requiem de nos élites.  Mie Chauvet, sans s’en rendre compte, est elle aussi une victime qui témoigne sur deux claviers différents, le clavier paternaliste d’une St Domingue ayant fait son propre 1789 et le clavier républicain du moins par les valeurs que prône cette Haïti criant sous tous les toits : Egalite, Liberté, Fraternité.  Price Mars était plus honnête quand il résumait  cette trilogie en duperies, hypocrisie et mensonge. Alors, que le sang fut verse a des périodes aussi éloignées les unes des autres confirme bien que la République a besoin de se réinventer non seulement sur le plan du discours, mais aussi sur celui du vécu et du concret. Ce n’est pas l’œuvre d’un jour, nous le savons, mais, c’est le rêve de toute élite qui ne veut plus se mentir à elle-même et qui a besoin de s’exposer au vent du large.

Ce qu’il convient de retenir toutefois, ce sont les affrontements que inspireront deux visions différentes d’un monde coince sur ses terres mais nostalgique des lointains horizons d’une Afrique mythique et d’une Europe qui encore aujourd’hui veut donner le ton. Des sables de l’Anse d’Hainaut aux mangliers du Maribaroux, la bataille est moins dans les faits que dans les âmes. Personne ne veut s’accepter et chacun s’invente un visage. Celui du maitre bien sûr, mais celui d’un esclave qui veut jouer au maitre sans cesser d’être esclave.  Le Professeur Leslie M. Manigat disait que l’esclave domestique, proche du maitre, avait aussi ses esclaves dans les champs. Il a oublié d’ajouter que la plus grande menace que  l’on pût  faire à un esclave mulâtre, c’était de le menacer de le vendre à un affranchi noir.  Le rêve de Sonthonax reste donc une grande illusion. Chaque fois que l’on touche à la matrice de ce pays, on entend le ricanement moqueur du commissaire français, comme si, à la manière de l’œuf de Léda, tout était joué au départ.

Les colères de Mie Chauvet puisent leur légitimité dans les excès  d’un certain pouvoir noir, si l’on veut appeler les choses par leur nom. On se souvient que dans les années 63 et 64, les journaux disaient que l’on veut à présent créer une nouvelle bourgeoisie à base de vols, de rapines et de crimes. Le problème n’en garde pas moins sa complexité. Et l’on entendra pour longtemps encore le ricanement de Sonthonax toutes les fois qu’on s’arrêtera à la couleur de la peau qui est loin d’être un horizon indépassable,  pour parodier  Jean Paul  Sartre.

Bibliographie
Les Jacobins Noirs
Cyril Lionel Robert .James:
1938
La Danse sur le volcan
Paris : Plon, 1957
Marie Vieux Chauvet
Amour, colere et folie
1968, Gallimard
   Septembre 2012

Tuesday, September 18, 2012

HAITI-LE MAL FRANCAIS

LA QUESTION HAITIENNE.-

LE JOUR OU LA FRANCE CESSA D'ETRE FRANCAISE EN HAITI

E(
n se comportant comme il l’a fait au jubile des St Louisiens, le 23 juin dernier, l’ambassadeur de France, M. Didier Lebret  sonna le glas de l’influence francaise en Haiti. Ce que l’on tient pour un faux pas diplomatique tombe bien  mal a propos.  Dans cette Haiti  en pleine americanisation, ou  la langue francaise risque  bientôt d’etre releguee aux oubliettes, d’ici 50 ans, si l’on ne fait pas attention, M.Lebret a paru  ignorer par son attitude irreverencieuse a l’endroit d’un ancien chef d’etat haitien   qu’il y a toujours une manière d’etre francaise,laquelle n’a rien a voir avec la bassesse morale du monde latin. C’est de la que viendra a mon sens l’echec de sa mission dans cette premiere republique noire de notre planete.

Charles de Gaule
Aux yeux  du peuple haitien en effet, peuple fier et pour cause, la France a  toujours represente la finesse des manieres, l’elegance du parler, et une certaine grace de l’esprit. C’est a peu pres a cette France que se referait l’ ancien president Georges Pompidou quand il disait a ses compatriotes : «  Français, Francaises,  nous ne sommes pas riches, mais, nous comptons ». La France et ce qu’elle represente continue encore de fasciner. Le General de Gaulle  le savait bien qui disait  a son ministre Alain Peyrefitte,  «  La France reste la lumiere du monde ; quand tout va mal, c’est vers la France que l’on se tourne ». Autant de symboles que le geste inattendu  de son representant en Haiti vient tout bonnement remettre en cause.

Consideree  comme la patrie intellectuelle et morale du monde, cette France de toujours dont les images petillent encore  dans les magazines de voyage, aura donc servi de refuge sentimental aux  Atheniens du temps des Orientales  de Victor Hugo, de terre d’asile aux russes fuyant la revolution de 1917, aux haitiens traumatises par le choc de 1915. L’on comprend sans doute pourquoi a l’offensive de la Marne on retrouve Haitiens et Senegalais, defendant les terres de France et cette patrie interieure ou les valeurs de solidarite et d’humanisme trouvent encore un sens. M. Debret devra donc retourner dans ses livres pour apprendre a etre francais, qui se resume dans  cette  manière d’etre, de croire et de penser, ensemble qui continue de faire la difference et qui donnera a ce peuple une place toujours enviable dans le concert des natioins.




Une France Et Une Haiti Gaullienne

Cette France a-t-elle en fait vecu ? Seul M. Debret pourrait nous le dire. En tout cas, quand on regarde de plus pres, il faut bien se rendre a l’evidence que ruant dans les brancards, comme il le fait meme au conseil de cabinet du Premier ministre, M. Laurent S. Lamothe,l’ambassadeur  depasse la mesure en renouant avec des reflexes de colon que l’on retrouve encore chez les Bekes de la Martinique et de la Guadeloupe et peut etre chez ce Premier ministre francais qui revait de lancer chez nous l’operation Rochambeau vers 2004, l’annee meme du bicentenaire de la victoire de Vertieres. Ce n’est pas la premiere fois que de tels petits francais oublient les lecons de  l’histoire surtout quand elle est haitienne. L’ancien PM JJHonorat a quand meme chasse un Bernard Dufour qui  revait de jouer aux proconsuls sur l’ancienne terre de St Domingue. Mais, c’est bien la premiere fois qu’un diplomate francais flagelle l’orgueil national en choisissant de ceder le pas a la bete plutôt qu’a l’ange qui cohabite chez notre espece. Or, l’homme, disait Henry Bergson, est quelque chose qui doit etre depasse.

Il sera, helas, toujours penible  d’abonder dans le sens de M. Peyrefitte denoncant ce mal francais qui continue de faire les malheurs de la France dans ses anciennes colonies d’Afrique par exemple. Les ressortissants  anglo-saxons entre autres deplorent la faillite francaise partout ou la conquete  a conduit les cadres administratifs de la metropole. La France laisse derriere elle des societes mal integrees, des generations aux prises avec des etats d’ames et des complexes qui n’ont pas fini de ruiner les ames, comme ce fut le cas en Haiti, des rivalites de personnes, de couleurs et de classes capables de conduire a la violence. La raison en est simple : la France du bon vin reste en France.

C’est sans doute a cette France que songeait De Gaulle quand il s’ecriait   des 1962 aux Algeriens son mot historique :Je vous ai compris, a l’epoque des «  fremissements des decolonisations africaines » . C’était a notre humble avis une facon de fermer le chapitre des injustices et des crimes lies a la conquete et a la presence francaise dans cette Afrique du Nord, confondue dans ce qu’on appelle depuis Benoist Meschin, le printemps arabe. Haiti, et surtout, l’Haiti de Francois Duvalier est devenue et non sans raison gaullienne parce que De Gaulle qui se plaisait a blamer les vacheries de  son peuple, savait egalement que l’histoire n’était pas une ligne droite,  que les societes et  les dirigeants  qu’elles se donnent pouvaient tout egalement  se sentir bien dans leur peau, sous ce que les donneurs de decons epris d’eurocentrisme appelllent dictature et pouvoir fort,  meme si  l’impunite blamable chez les uns pouvait bien porter le nom de pouvoir imperial chez les autres sans ce que ces ambassadeurs trouvent  quoi que ce soit a redire.

ADIEU MAMAN, ADIEU PAPA, VIVE HAITI, VIVE LA FRANCE,!

N’empeche que La France ait connu de tres belles heures en Haiti, cette « fille ainee de la latinite » .Parce que si etre Français, c’est vivre et mourir pour quelque chose de plus grand que soi, les Français tombes du cote haitien  a Vertieres en novembre 1803 n’auront pas verse en vain  leur sang sur nos terres epiques sinon  la justice, le sens de l’autre et la decouverte de soi a travers l’autre n’eussent pu  transcender les petitesses et les mesquineries individuelles  qui appartiendront toujours  comme ces ambassades  a la poubelle de l’histoire. Il n’y a point d’autre explication a l’embrigadement de francais dans l’armee de Toussaint Louverture, pas plus qu’il n’y en a  chez ces anciens conventionels venus deliberement terminer leurs jours en Haiti, apres l’independance. Certes, il existera toujours une histoire d’amour et de repulsion entre Haiti et la France. Mais, cette assertion qui veut que chaque habitant de notre planete ait deux patries : la sienne et puis la France tient encore, notamment quand la France se trouve happee par le malheur que ce soit en 1914 ou en juin 1940. Par sa revolution, par sa pensee, la France a toujours eu une vocation planetaire et humaniste. Ils viennent bien sur trop tard, ces aventuriers deguises en diplomates qui croient pouvoir reecrire une histoire a laquelle ils sont quasi etrangers. Les Français tels que l’ancien correspondant de l’AFP Dominique Levanti se font encore inhumer en Haiti, et des Haitiens tout aussi connus choisissent pour sepulture l’ancienne terre de la Bauce ou la pente inclinee d’une petite colline decrite par Flaubert ou  Chateaubriand. Il n’existe pas de temoignage plus eloquent au depassement et a la profonde verite des etres.

En 1944, a la liberation de Paris par les troupes avancees du general Leclerc, les cloches d’une capitale qui dut servir de reference a la mediterrannee de Charles Maurras carillonnerent comme pour exprimer la solidarite de cette France noire a la lutte du peuple francais. C’était sous Elie Lescot et la capitale s’appelait  P-au-P. Inoubliable ce sacrifice d’un jeune Haitien pris par les Nazis qui s’ecria au moment d’etre fusille : Adieu maman, adieu papa, vive Haiti, vive la France... Quand au cours d’une histoire tricentennaire et meme plus, de tels liens ont été tisses entre une metrople et sa colonie, c’est dire qu’il y a au dela du sang verse et du langage des armes , il y a, M. Debret, un monde shakespearien qui veut se soustraire a  la fatalite pour ceder la place a un reve prometheen, ou les hommes decideront de leur propre avenir, selon des choix  qui relevent de ce depassement auquel la magie de notre histoire t’invite, mon pauvre homme.   Parce que « ceux qu brisent sont bien des fois ceux qui creent, selon le president Francois Mitterand, il y aura toujours de ces francais, heros obscurs de nos terres profondes, qui sauront en se joignant a l’hymne universel de la creation quotidienne, sauver notre jeunesse du doute et du desespoir. Je pense ici a un vieux professeur  breton de Leogane qui avait peine a contenir sa colere en evoquant l’acte infame  d’un capitaine allemand vis-à-vis de notre bicolore au 19 eme siecle.




DE LA M… DANS UN BAS DE SOIE

L’histoire se repete, l’histoire begaie, s’ecriait Roger Gaillard,l’historien de l’occupation americaine  de 1915.  Dommage qu’en se repetant dans cette enceinte saintlouisienne qui n’a pas que des ombres au tableau une presence diplomatique ait reveille ce que l’histoire depuis Paul Valery recele d’amertume et de rancunes mal digerees. Mais, fort heureusement, l’histoire n’a pas que le facies de Janus uniquement tourne vers le passe.  En 1945, ce fut bien la petite Haiti a la conference de San Francisco qui sans ruminer  les atrocites attachees a Leclerc et a Rochambeau sut imposer le francais comme langue internationale pour les batailles du futur.  Il y aura toujours meme chez  ceux  qui restent tres peu avares du sang humain,  quelque chose a tirer parce que la conquete depasse souvent le conquerant. Le Code napoleionien reste une reference dans l’histoire du droit haitien, sans nuire a la mémoire de l’empereur qui laissa autant de veuves que d’orphelins . N’y a -t-il seulement  que du sang chez les dictatures ? Voila une hypothese d’ecole sur laquelle se pencher, M. Debret. La democratie a tout l’air de ces vierges qui ne savent pas encore  si la fecondation passe d’une manière ou d’une autre par le sacrifice.

J’aurais aime emprunter a Francois Mitterand son tres beau titre : «  La paille et le grain »pour retrouver ce sens de la vie aussi bien dans la France profonde que sur  nos terres secretes ou les labours et les saisons racontent l’interminable dialogue de la terre et du ciel. Nos paysans qui, dans le haut Artibonite et sur les pentes du Macaya, continuent encore de boire a la sante du roi de France veulent tout simplement dire que la vie est permanente surtout lorsqu ‘elle prend le masque  de la mort. Au fond rien ne meurt, pas plus que la paille du president francais ni non plus ce que la France garde d’ivraie dans la recolte . mais, la diplomatie qui est l’art de la politesse  devra chaque jour se reinventer et laisser croitre le bon grain de la France de Mitterand. La France est bien sure trop grande pour chausser les bottes du petit Poucet ; sinon, comme un Napoleon en colere parlant  aux Tuileries en janvier 1809  a son ambigu ministre Talleyrand,ce beau monde qui se targue de parler au nom de la France ne sera  que finalement « de la m… dans un bas de soie »



Miami, Florida
Aout 2012




LES PRODUCTIONS GLOBE ADVENTURES HORIZONS


Saturday, September 15, 2012

LA QUESTION HAITIENNE
LA FIESTA DEL CHIVO
Parce que au commencement était la parole, il y a des mots et des livres qui sacrifient toute une époque, tout un pan de l’histoire en la réduisant rien qu’à ces épisodes qui plaisent à un public hélas naïf et paresseux. Ce public, lui, se livre non sans complaisance  à ce jeu de théâtre. Mais, au fond, même quand la presse manipulatrice  pousse l’opinion publique à choisir ce qui reste du menu, en fait, ce  réchauffé que l’on sert à ces voyageurs épuises qui arrivent au p’tit matin, on sent que derrière le pouvoir des mots, il y a un tant soit peu de substance, et pas forcément  le pire.

La Fiesta del Chivo du romancier péruvien Mario Vargas LLosa condense la era de Trujillo dans les manœuvres de palais qui précèdent l’assassinat du chef dominicain. L’intrigue est conduite de main de maitre, invitant le lecteur  à aller jusqu'à la dernière page. Trujillo est décrit comme ces personnages des tropiques qui vivent leur quotidien en faisant des libations aux dieux de la fête : rhum, danse et musique. Les femmes, l’argent et le pouvoir couronnent bien sur ces bacchanales  sauf que ces délices dignes de  Capoue ne mènent nulle part, parce que, faute d’être institutionnalisée, la vie dominicaine, au temps du Chivo, se déroule dans un décor de sang et de violence qui hantera jusqu'à la fin, ce que trujillistes et opposants appellent  la era de Trujillo.

Trujillo n’a pas moins marqué son temps. Le romancier à vouloir imiter l’historien, fait un tort immense à une époque qui mérite d’être mieux connue. Ces remarques valent tout aussi bien pour les Comédiens de Graham Green, livre très caricatural pour Papa Doc. Si l’histoire s’acharne à reconstituer la vérité, cette tache prométhéenne, qui ne s’arrête qu’à l’a peu prés, le roman est par définition un débordement d’imagination qui embellit et enlaidit en même temps le paysage, toujours  aux dépens de la vérité.

La Fiesta Del Chio éclaire néanmoins  sur la réalité de ce temps dominicain. Néron aurait et a en fait prêté sa tunique aux trujillistes, entrepreneurs  portés à l’esprit clanique, mais avides  en même temps d’honneurs et de cette bénédiction que les latino et antillais attendent des métropoles, sorte de paradis perdu alimentant toutes les nostalgies…C’est en fait bien une fiesta où tout le monde trouvera son compte, fonctionnaires qui doivent leur position au Chivo, mais également opposants et finalement les requins de Boca Chica qui se nourrissent dans leurs eaux de cet excès de sang qu’ils attendent au pied des falaises.


Mais, la Fiesta prend toute une autre perspective quand Angelita Trujillo raconte l’histoire de son père et du pays dans lequel elle a grandi. Témoin inattendu et privilégié, ayant vécu les choses du dedans, son ton se rapprochera plus de la verite, même si c’est sa verite à elle. La  oùù le romancier péruvien voit la violence et les scènes sanglantes de Johnny Abbes Garcia, le chef du SIN, service d’intelligence nationale, Angelita voit un père aimant, plein de prévenances  pour les petits enfants. 50 ans plus tard, les voix intimes de la « era de Trujillo »se lèvent, notamment celle de la « nieta » del Chivo, la fille de Ramfils, qui elle s’engage avec moins de passion à revoir cette période qui divise encore les dominicains.

Le Chivo n’est finalement pas mort. L’histoire prend toujours sa revanche sur le romanesque.

13 Aout 2012, Miami




















Friday, September 14, 2012

LA QUESTION HAITIENNE- Le passe est bien la clef du futur


La question haitienne, meme a ceux –la qui tentent d’en faire, comme une question situee en dehors du temps, par une sorte de fatalisme extra historique, continue malheureusement d’etre l’otage de l’histoire. La preuve, c’est qu’on a dit d’Haiti qu’elle etait emprisonnee par son passé. Cependant, par une sorte de paradoxe, jamais communaute n’a tenu son futur engage a ce point dans son passé.
Quand on regarde derriere soi, dans une sorte de survol du temps , on peut deplorer que au cours des deux siecles, (qu’on se plait a appeler parfois temps des baionnettes ou temps haitien,) Haiti ait rate sa revolution technologique bien que elle fut en contact quasi permanent avec les puissances auxquelles le 20 eme siècle doit son visage et ses conquetes. Nous etions condamnes a admirer ailleurs bien loin de nos rivages, ces cites de verre, ces locomotives, ces aeroports, ces autoroutes qui sont l’image ideale des pays developpes. L’Afrique du 21 eme ne peut trouver de reference, comme une bonne partie de la planete d’ailleurs, que dans le groupe du G 8 et meme du G21. Quant a Haiti, elle continue d’alimenter la mauvaise conscience du tiers monde et des pays du Nord selon laquelle la premiere republique noire du monde symbolisait l’incompetence congenitale, la mauvaise gouvernance, la faillite annoncee ,selon plus d’un, dans le code genetique des populations transplantees. Les Haitiens ont beau repeter que l’histoire etait la pour prouver le role de leurs tuteurs et de leurs modeles. Rien n’y fit. Haiti ne devait s’en prendre qu’a elle meme. L’histoire, poursuit-on, est bein le domaine du passé, meme si le passé n’est pas vraiment passé, selon W. Faulkner.
Quoi qu’il en soit, les conséquences attachees ou non a ce passé, sont telles qu’aujourd’hui force est de reconnaitre que le malaise social et la fragilite institutionnelle repesentent bien le prix a payer a des structures economiques, sociales, et mentales, scleroses . Le quotidien haitien est fait de morosite, de resignation a la limite du fatalisme. Le flottement des ames ,l’impuissance a decider du lendemain, le manqué de consistence des elites, sont la pour deconcerter les meilleurs. Tandis que les observateurs se demandent a quoi reve Haiti , d’autres s’interrogent: Quo Vadis , Haiti ? Ce sont bien des reflexions qui temoignent du grand malaise, comme si Haiti etait des le depart aux prises avec des forces que jamais elle n’arriverait a juguler.
Pourtant, deux siecles auparavant, dans un décor a la limite de l’epopee, Haiti se reclamait d’un messianisme liberateur a l’echelle du monde. Qu’on le voulut ou non, l’exemple d’Haaiti , tout contagieux qu’il fut, portait en lui meme sa dose de republicanisme et d’humanisme qui n’a pas fini d’etonner. C’etait assez pour que l’ivresse de la victoire alimentat alors les projets quasi evangiqieques de liberte et de peuplades a affranchir de l’esclavage. C’etait en meme temps assez pour un petit pays brule par la guerre et mis au ban des nations qui pretendaient hypocritement etre republicaines. Ce qui s’est passé depuis, au grand soulagement des societes dites eclairees, n’etait pas fait pour rassurer l’avenir. Haiti allait rentrer dans une phase de declin qui illustra bien qu’elle etait tout aussi bien mal partie.
Qu’est ce qui au depart mit comme un frein a cette jeune puissance montante? Personne ne s'est t jusqu’ici arrive a offrir une explication plausible a l’essoufflment de la longue marche des libertes . Toujours est –il cependant que, solitaire et solidaire, la cause haitienne detonnait dans un monde qui disait une chose et en faisait une autre. Le reste, on le connait. Haiti a longtemps porte un masque. Vue a travers un tel prisme, l’experience haitienne ne pouvait offrir meme le plus timide bonheur au plus obscur de ses concitoyens. Qu’est ce qui s’est finalement passé dans ce pays ou quelque chose d’inedit avait ete promis?
La reponse ne va pas tarder. Au debut de ce 21 eme siècle, l’heure de verite semble avoir bien sonne. Les Haitiens vont chercher dans les reliques de la legende et ce qui reste de leur epopee un stimulant capable de les aider a engager la bataille du futur. La premiere victoire de l’homme a toujours ete sur ce qui subsiste en lui de fragilite et d,incertitude.. Il y aura toujours la force brute pour s’attaquer aux citadelles, mais ce n’est que le regard que nous portons sur nous memes et notre conception de la vie et du futur qui livrera le fil conducteur face aux meandres et aux obstacles a contourner. C’est seulement a ce prix que nous pouvons relever ce que le futur renferme en lui meme de defis et de menaces

3 janiver 2011

LA QUESTION HAITIENNE - Le Vent du Large

Les juifs mis a part, il n’existe pas de people aussi porte a courir le monde que le peuple haitien. Il se fait pincer dans les aeroports de Londres, lorsqu’il n’est pas interpelle aux frontieres du Canada. Il se souvient confusement de ses departs d’Afrique, mais c’est a peine si la lecon ethiopienne et les longues siestes sous le baobab lui tiennent lieu de viatique dans un monde devenu houleux.
Aux premiers jours du 20 eme siècle, les departs haitiens vers Cuba disaient déjà que la famille avait eclate dans les jardins de la peninsule du Sud. Pourquoi ,s’est –on alors demande, le vent du large soufflait –t-il déjà dans nos villages livres au chant et a la danse ? On a oublie et on oublie toujours que, des le berceau, le ver etait dans le fruit; qu’en d’autres termes, ce que, dans son livre, le Paysan Haitien, Paul Moral appelle la precarite allait devenir une constante dans le quotidien haitien.
Precaite des ressources, precarite des styles de vie jusqu’a la precarite du reve,telle etait au depart la vie haitienne. Parce que l’horizon n’autorisait aucun espoir qui vaille,la seule issue restait l’emigration. D’abord,on ira a Cuba, et Santo Domingo, parce que plus pres de nous. Il en resultera une haitianisation de la mer caraibe qui se laisse a peine deviner. Oncontinue d’appeler conquete pacifique cette intrusion haitienne, que ce soit dans l’industrie du batiment a SD ou dans l’interieur des terres aux Bahamas.Mais, loin s’en faut, cette conquete n’avait cependant rien d’une conquete.
Une fois a la Desirade, non loin de la Guadeloupe et de ses eaux bleues, un etudiant en art de Vincennes avait objecte a des Haitiens d’une certaine aisance qu’ils n’etaient pas haitiens. Pour le convaincre, nos compatriotes durent sortir leurs passeports. L’etudiant n’avait vu que des haitiens chasses par la crise rurale. Ceux qui a la fin des annees 50 partirent pour l’etranger s’etaient déjà occidentalises. Ils etaient tout aussi bien chasses par la crise,mais ils etaient differents.
Cela dit, la question haitienne au tournant des annees 60, malgre le fait politique, restait encore une question migratoire, avec en dessous, l’epineuse rivalite des imperialismes opposant une France essoufflee a redefinir sa politique post coloniale a l’arrogance naissante des USA. Les elites haitiennes n’avaient pas oublie leur role a Savannah, mais elles verseront plus tard leur sang a la Marne. Si les annees 20 sonnerent en Haiti les adieux a la Marseillaise, 40 ans plus tard, ce sang coulera a la bataille de Saigon , preuve que Haiti, trop etroite pour ses ressortissants, cedait déjà a l’appel des grandes terres.
Placee dans une certiane perspective, Haiti aurait pu se demander si sa vocation consistait se promener au dela de ses frontieres ou si plutot le magnetisme de l’histoire etait tel que le passé devorait inexorablement l’avenir. A la fin des annees 80, on soulignait que Haiti avait quand meme trois cultures, mais une histoire. On peut toujours se demander si la culture pesait plus que l’histoire dans le “making” de la nation. Ces considerations prises en compte, ne faut-il pas fianlement donner raison a Roger Gaillard: Haiti est une terre ou l’on passe. Les derniers pianos se taisent déjà a St Cyr (Jacmel) et a Rochasse, (Jeremie), tandis que les etendards des Nations Unies claquent sur les hauts plateaux de Fond des Negres…
Alors, il reste le grand large,ses horizons perdus et ses incertitudes…il reste aussi la deroute des ames et la folie des hommes et des femmes qui ne reconnaissent point leur , un pays forge a Vertieres et lors de la desoccuaption. Les magazines des annees 2000 identifient partout la presence echevelee haitienne, a la recherche d’un pot au feu et d’un toit dans le monde. Les Haitiens sont en train de se creer une nouvelle identite aux depens de ce qu’ils sont ou de ce qu’ils devraient etre. Des modeles perissables naissent et meurent sans trop germer dans un humus déjà fragile. Une autre facon de dire que l’ame nationale, des annees après le reveil des annees 20, reste encore a creer, a raffermir et a orienter.


Date: Monday, January 3, 2011, 2:02 PM

LA QUESTION HAITIENNE - Puissance et Fragilite

Une amie architecte me parlait une fois non sans eloquence de la puissance et de la fragilite haitiennes

La puissance,precisait-elle, se referait a l'histoire. Vertieres, La Crete a Pierrot, la Revine a Coulevres, dans son esprit,representaient les temps forts de cette puissance en train de se faire. Personne n'a compris pourquoi les negres se battaient a ce point par les maitres du monde d'alors. Sortis de l'esclavage, les guerriers de ces temps epiques ne se le faisaient pas repeter.Il fallait vivre libres ou mourir. Les notions de liberte, d'independance, les valeurs republicaines qui reniaient les agissements de la France napoleionienne, pouvaient-elles avoir un sens pour ce monde ne a peine a l'humanite? Toujours est-il cependant, la victoire des forces indigenes, la gestion maladroite qui s'ensuiuivit dans un etat ne sous le signe de la precarite alimenterent ca et la la legende haitienne, la portant au niveau de mythes. C'en etait assez pour que Haiti, meme dans le brouillard des relations internationales, acquit une place a la fois enviable et discutable.

Ce n'etait pas la premiere fois que des pays liluputiens faisaient dans le reste du monde un bruit sans commune mesure non seulement avec leur taille, mais egalement avec ce qu'ils representaient comme entite dans un univers domine par la force. Sur le plan des parametreset des etalons traditionnels, Haiti ne representait pas grand chose. Parler de la puissance en ce qui concerne Haiti, c'est s'exposer au ridicule, si l'on veut. Mais, nous autres, nous savons qu'il existe bien une Haiti forte par sa capacite de resistance, sa resilience au fait.Les malheurs, l'esclavage et ses risques de deshumanisation ne sont pas arrives a rompre le precaire equilibre des ames ni leurs potentialites.. Il existe une capacite d'esperer qui porte l'empreinte du triomphe permanent de la vie. " Bon dieu bon " est une attitude percue comme beate et inutile, mais c'est aussi en meme temps un rendez vous avec l'energie universelle. A ce compte, l'attitude haitienne, parce qu'elle ne mene pas au suicide, celebre la vie belle et immuable dans sa permanence.Et c'est deja beaucoup.

Cette puissance, cependant, partage le meme lit avec la fragilite. Quand on parle de fragilite, nous evoquons bien sur la fragilite de nos ressources et dans un sens plus large la fragilite de la vie. Depuis plus d'un siecle, les Haitiens comprirent que l'avenir n'etait pas chez eux, mais de preference ailleurs, d'ou cette ruee sur Cuba, sur SD, puis sur l'Amerique.Nombreux sont les etrangers qui ont voue ce pays a une sorte de malediction, a commencer par les francais vaincus et les evangelistes qui se sont heurtes aux forces irrationnelles de l'instinct et du nationalisme primaire. La fragilite s'est illustree dans l'embargo periodique impose a ce peuple; elle se manifeste par le rejet de tout ce qui est haitien, preuve que les ames ne se sont nullepart enracinees.La deshaitisation est la marque la plus vive de cette fragilite.Elle infiltre la famille, la societe et la nation.

En termes plus concrets, la modernite semble etre le signe avant coureur de cette fragilisation du monde haitien. En 2011, un siecle apres le cri du president Antoine Simon contre les departs paysans, ce sont maintenant les elites qui ont pris la releve. Les familles haitiennes s'investissent corps,biens et ames, dans une Amerique conquerante, imposant partout le American way of life . Il existe cependant des possibilites de creer un monde haitien a partir de ce que nous sommes. Non pas qu'il faille jetter aux orties ce qu'il y a d'enviable ailleurs; mais, on ne peut construire que sur ce qui nous est propre. Apres avoir singe la France, puis l'Amerique, je pense que le moment est arrive pour nous d'etre soi meme sans se fermer aux autres. C'est la le prix a payer pour une vraie renaissance et c'est egalement la meilleure facon de se montrer au reste du monde, si on tient a l'enrichir sans nous appauvrir nous memes.

La puissance et la fragilite ont toujours cohabite dans le monde

14 Avril 2011

LA QUESTION HAITIENNE - Du sable, de la danse et de l'histoire

Il y a peut etre trois regions dans le monde ou la politique n’est plus ce qu’elle etait. Ce sont la peninsule arabe, Haiti et bientot le Bresil
Avant d’etre cette mosaique d’etats lies par le fanatisme et l’or noir, la peninsula arabe est d’abord une sorte de monastere ou le calendrier n’a rien a voir avec notre gestion plutot laique du temps. Plus qu’une culture, le monde arabe se caracterise par une soumission a la volonte de ses dieux nes comme la plupart d’entre eux dans des regions ou l’irrationel et l’imaginaire tiennent une place a part. C’est dans le desert arabe caracterise par l’immensite des sables ou naissent et meurent les mirages que Mahomet a eu sa revelation, laquelle, du Yemen a la Peninsule Iberique, communique aussi bien le frisson de l’aventure que celui de la conquete. Cette conquete est donc inseparable de la volonte supreme d’Allah qui l’a inspiree et l’inspire encore. Au moment ou le printemps arabe, selon la belle formule de Benoit Meshin,se reveille une fois de plus sur cette meme terre qui inspira a Lawrence les sept piliers de la sagesse, il est difficile de faire le depart entre les aspirations democratiques qui ont vu naitre et mourir une Jeanne d’Arc en Iran et les pulsions de l’integrisme arabe qui,dans cette peninsula, s’alimente a la source de la foi, celle –ci fut-elle meurtriere et destructrice comme on la connait en Amerique et dans le reste du monde occidental .
Ce printemps arabe est bien le printemps de la foi, signe vivant de cette crise de l’Islam sise a mi-chemin entre des aspirations nebuleuses au changement et sa vocation guerriere qui, tout au long de l’histoire, a donne a la chevauchee arabe les couleurs que l’on sait. Cette crise porte a la fois le sceau de la vie et celui de la mort, entremelant religion et politique dans ce curieux dosagedu fondamentalisme qui couta la vie a Sadate en 1981. Dans le monde arabe, la politique est bien voisine de la foi donc du fanatisme, meme a l’heure ou cette peninsule tente de sortir de son propre moyen age.
Mais, si bien loin, sur les bords de cette Mediterranee consideree comme une region d’epanouissement des civilisations Greco-romaines , l’on continue a se battre, a danser et a tuer au nom de Dieu, en Haiti c’est le contraire qui prevaut. La danse du nouveau president haitien, controverse mais repondant a cet elan vital qui rend si speciale la misere et la pauvrete haitienne, n’a rien a voir avec les guerres saintes de l’histoire d’Haiti, datant des annees anterieures a l’independence. Le fait que Haiti continue a chanter et a danser meme au plus sombre de l’histoire trahit une vitalite qui annonce le triomphe et les celebrations de la vie, pour parler comme Rene Dubos. La politique meme la plus cynique reste impuissante devant ces forces instinctives du jaillissment de la vie . Cette joie de vivre essentiellement apolitique a son poids dans les lendemains qui se preparent pour Haiti meme quand les pontes du Clerge Breton disaient le contraire,pres de 50 ans auparavant. En fait, contrairement aux recettes pour la croissance et les arguties tournant autour du PNB, la joie de vivre, en creant l’illusion du bien-etre, a montre qu’il y a une maniere d’etre heureux . A croire qu’il existe egalement les dieux de la danse et de la transe.
Alors, entre les pays du minaret ou, a la tombee du jour, on appelle a la priere, replique musulmane de l’Angelus de Millet, et ceux ou chaque crepuscule est une invitation aux fetes des sens et de la vie, il y a de la place pour un dieu qui n’est pas celui de la mort et du fanatisme. Parce qu’ils ont leurs moeurs adoucies par la magie de l’art, les peoples qui dansent dansent beaucoup plus au nom de ce qui nait qu'au nom de ce qui tue. L’espoir du peuple haitien reside donc dans son sens irremediable du rythme et son culte de la joie. Une ferveur paienne est-on tente de dire, mais Dieu se sent et ne s’impose pas. C’est ce qui fait de la culture negre non pas une culture superieure, mais simplement une culture differente, qui continue de faire encore la difference.
Quant au Bresil, un sous continent marque du sceau de la demesure, et en meme temps terre de la samba,il fait déjà partie de ces pays du BRIC, le prochain defi americain. Mais, parce sortis malgre eux et sans le savoir du schema froid des organisations internationales, les bresiliens preparent plus qu’une revolution raciale. En creant ce monstre de la diversite epidermique dans ce sous continent,, ou le rythme a sa grace et la beaute son rythme , une symbiose jusqu'ici inedite, e Portugal colonialiste a libere des forces inattendues qui colorent et orientent l’histoire. Nul doute que l’art et la vie prendront le dessus meme quand les inegalites banalisent la mort et le quotidien. Il y a trop d’effervescence vitale au Bresil pour que le fanatisme soit un corollaire de l’injustice. Le chant et la danse sont devenus avec le temps notre meileur bouclier dans un monde devenu incertain et imprevisible .
Signes que l’histoire peut encore s’ecrire differemment.

Frantz Bataille,
North Miami Beach,
Avril 2011

Friday, September 7, 2012

LA QUESTION HAITIENNE - La fin de la societe traditionnelle



Les haitiens pensent que le coup de grace a l’economie traditionnelle est parti de Santo Domingo. C’est vrai que les produits des « haciendas dominicains »,envahissent sans compensation le marche haitien. Les œufs sont de mauvaise qualite, ripostent les consommateurs locaux. Mais, il n’y a rien qu’on puisse faire pour changer le cours des choses. Les chiffres d’affaires penchent en faveur de la republique voisine, rien qu’a considerer l’avalanche des  agrumes et d’autres  produits agro-industriels, installes de gre ou de force sur le  marche haitien. 
Haiti offre ainsi  le paradoxe d’un pays agricole incapable de s’affirmer dans son propre domaine. A Miami, capitale economique de l’Amerique centrale et latine, des entreprises specialisees dans l’envoi de comestibles en Haiti traduisent   tragiquement le manque a gagner haitien dans le domaine cerealier et autre. Riz, lait, pates, huile de table, etc tout y passe. La diaspora en tire une certaine fierte, mais au bout du compte, Haiti ne fait que s’enfoncer dans la dependance.
S’ajoute a ce tableau le role de la mode et de la musique. les jeunes  de Gd Goave ont constitue leur group rap qui correspond a Barricad Crew de Pt-au-P, une veritable armada . Dans les annees 60, le twist et le cha-cha-cha apportaient une touche etrangere a la danse haitienne, plutôt rebelle pour ainsi dire a l’art classique, mais,la meringue, le compas et la musique folkloriue dominaient le paysage artistique haitien. Dans l’ensemble, la dependance au niveau de la consommation et dans une certaine mesure de la musique est un fait patent. Ce qui n’est pas moins evident au niveau des valeurs traditionnelles prorpement haitiennes.

Le domaine de l’education  et de la vie familiale reflete au centuple les bouleversements en cours en Haiti. C’est la que la fin de la societe traditionelle est la plus marquante. Le francais recule devant l’anglais a un rythme vertigineux. Le modele americain s’affirme dans plusieurs domaines, a commencer par celui des affaires. Les garcons et les filles maitrisent mieux l’anglais, note l’observateur. Ce changement se precise aussi au niveau de la famille qui tend de plus en plus a etre nucleaire, contrairement a la famille haitienne horizontale, c'est-à-dire elargie jusque vers la fin des annees 70.  

Memes  bouleversements au niveau de la consommation quotidienne et des services de sante. Le dollar est la monnaie de change ideale. Les loyers, les services , les frais hoteliers, tout se regle en us dollars. Les avions ambulance font le va et vient entre Haiti et la ‘Floride, et la note se paie egalement  en US dollars.

Cependant, il souffle apparemment sur ces fins de regne comme les signes du renouveau et du remodelage de la societe traditionnelle. Le telephone cellulaire consacre la fin de l’insularite  et l’insertion d’Haiti dans le monde .  La digicel irlandaise, le natcom vietnamien, sans mentionner la partition haitienne de Haitel, de Voila, met fin a l’isolement historique d’Haiti.  Le monde rural est happe par la vague du telephone cellulaire pour le meilleur et pour le pire, dira-t-on. Fini le temps ou le tanbour et le lambi servaient a transmettre les nouvelles de «  colline en colline, de vallee en vallee jusqu'à la ville voisine. »

La religion n’est pas non plus en reste. La foi catholique garde sa ferveur, mais le catholiisme n’est plus la religion  officielle ni de reference. L’islam pourrait un jour lui demander des comptes, ce qui n’est pas souhaitable, compte tenu des mini guerres de religions engagees entre le vodou animiste et le prolesytisme reformiste pro americain. Soit dit en passant que la religion en plus de ses vertus temporisatrices et d’opiacees devient de plus en plus un bric a brac pour dire le moins. Un journaliste parlait une fois du «  business de Dieu » ; de braves types en font leurs choux gras sur Church Ave, Bklyn, NY et en Floride.

C
es prophetes en mal de reussites materielles autant que les petites eglises catholiques de la base ne sont pas arrives a pacifier Haiti.  L’haitien des decennies 90 et 2000 s’est deshumanise, manipule par une presse irresponsable et incendiaire, «  la grande deception du pays », notait un haut fonctionnaire public. Le pays semble danser sur le volcan de Marie Chauvet, parce qu’au radicalisme des vieux problemes, on a oppose des reponses radicales, et pour cause.  Fini egalement la formule de bienvenue  de la vieille societe  «  Honneur, Respect »

C’est le legs, est-on tente de dire, des decennies 70 & 80. La banalisation de la vie devait y trouver son compte, car l’economie branlante ne tient que sur les bequilles d’une economie souterraine, disons la drogue, mais,qui a cesse d’etre  souterraine. En Haiti, c’est une monnaie d’echange ideale, tant la demande depasse l’offre. En tout cas, dans la basse ville, le marche informel inclut la drogue dans le panier des petites marchandes offrant des bouteilles d’eau et des pcchettes de cigarettes. Les caids se prelassent dans les corridors, chausses de tennis jordan,et entoures d’un harem dont la moyenne d’age ne depasse pas 25 ans. La vie est excitante dans la penombre rehaussee d’une pale lueur de television. Kidnappings et ranconnements se  negocient  dans ces milieux interlopes. Quelque chose qui n’est pas haitien se developpe et qui echappe a Haiti.

Pourtant, pour les P.D.G. impatients de rivaliser avec des homologues bases en ?Floride, l’export/import,les transactions aero –portuaires, la gestion banquaire et la facture  petroliere reste  un domaine plutôt sophistique et quelque peu exclusiviste. C’est, malgre le vent neo-liberal, l’une des chasse-gardees du pouvoir. Tout investissement etranger passe plus ou moins par les douanes et les installations aeroportaires.
La politique a son mot a dire. C’est peut etre la que la diplomatie d’affaires trouverait un champ d’action ideale.

Quoi qu'il en soit, pour une population a majorite rurale, l’Haiti agraire  helas n’a plus sa place.